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Les tapisseries de Bose
Lettre aux amis
Avent 2009
Croire à l'amour de la vie commune, se décentrer dans la vie commune, faire place à l'autre dans la vie commune, se courber sur l'autre
Chers amis, chers hôtes, et vous qui nous suivez de loin,
Par cette lettre qui vous parvient alors que Noël est imminent, nous voulons vous dire notre affection et notre proximité, en vous transmettant également quelque chose de notre vie et de nos attentes… Ainsi, pour vous faire participer non seulement à notre quotidien, mais également au sens de la vocation que nous cherchons à vivre en réponse à un appel du Seigneur, à une aspiration qui devrait animer nos activités, avons pensé partager avec vous l’événement qui, presque chaque année, marque une étape de notre cheminement monastique : la fête de la Transfiguration, durant laquelle les frères et les sœurs qui ont terminé leur chemin de discernement et de probation émettent leur profession solennelle et définitive. Les mots du prieur fr. Enzo expriment bien ce qui, pour nous, reste ferme au-delà des saisons et des années qui passent : cette recherche de l’amour de Dieu vécu en communauté, qui nous a un jour appelés à Bose et que nous avons reconnu comme notre vérité de simple chrétiens.
Les frères et les sœurs de Bose
De l'homélie de fr. Enzo durant la veille de la Transfiguration
En cette nuit, nous vivons plus que jamais notre vocation et nous en devenons conscients. En tant que moines, nous n’avons pas de mission particulière ou de fonction dans l’Église : nous sommes simplement des hommes et de femmes réunis, d’un point de vue humain, presque par hasard. Nous sommes là, dans le désert ou dans les lieux écartés, sur des monts ou dans des vallées ; pour quoi ? Pour se tenir ensemble devant Dieu, dans une vie commune, rien de plus. Nous ne faisons rien de particulier sinon rester devant Dieu et avec Dieu, à l’écoute de Dieu, dans la recherche de Dieu et pour nous laisser trouver par Dieu, dans l’attente de la venue de Jésus Christ, avec lequel nous voulons être pour toujours (voir 1Th 4,17). Et tout ceci, en priant et en travaillant, en priant comme chrétiens et en travaillant comme tous les hommes : ora et labora, deux dimensions absolues, extrêmement liées, qui composent la vie du moine.
Quand on parle de vie monastique, un mot vient immédiatement à l’esprit : stabilitas, auquel la Rège de saint Benoît accorde beaucoup d’attention et de place (voir RB 4,78 ; 58,9.17 ; 60,8 ; 61,5). Et il est vrai que les moines vivent la stabilitas, et que cette solidité, cet « établissement » ferme fait d’eux, comme l’affirme Benoît, le genus fortissimum coenobitarum (RB 1,13). Mais leur stabilitas est en mouvement. Dans l’Église pérégrine sur la terre, une Église faite de caravanes qui traversent des villes et des déserts avec un but, avec un « orient » précis, la rencontre avec le Seigneur qui viendra dans la gloire, les moines sont présents eux aussi. Ils cheminent en groupe, ils sont une caravane : leur nom est koinonia, « communauté, communion ». Je ne sais pas s’ils se tiennent devant, ou au cœur, ou s’ils suivent, mais il est certain que les moines, où qu’ils soient dans l’Église, devraient savoir tenir le visage tourné vers le but qui est le Seigneur, ils devraient être comme des signes lisibles de la direction de toute la caravane. Je le répète, les moines n’ont pas de tâche ni de mission particulière : s’ils sont fidèles à la vocation qu’ils ont reçue, ils « font signe », ils sont comme des signaux sur le chemin, rien de plus…